6 Juillet 2018
LES ILLUSIONS DU TEMPS QUI PASSE
IX) Le chemin de toi
Qu'est-ce que l'amour?
Nous marchons sur le même chemin,
Nous mangeons dans les mêmes assiettes,
Nous partageons la même couche,
Nous savons à force et douceur les secrets des corps de chacun,
Mais il me semble surtout, nous brûlons chaque fois de nous voir avec le
même émerveillement qu'au premier instant,
Nous nous voyons comme des miroirs imparfaits l'un l'autre,
Et c'est parce que le reflet est beau, pas tout à fait lisse et bien poli,
Qu'il nous plaît sans cesse de le regarder comme une première fois.
Je t'ai donné mon corps comme s'il s'agissait de la première fois,
chacun avant toi étaient une première fois,
et chacun avant toi était un pas de plus vers toi,
chaque fois tentative d'admirer le miroir que tu es jusqu'à te trouver.
Pourtant, il se peut que toi aussi tu ne sois que l'ébauche du miroir,
Comment savoir, le miroir est si flou.
Et pourtant si jamais il était poli comme on peut les observer
aujourd'hui,
j'aurais peur et je m'enfuirais...
Mais ton reflet est si confus, si pareil à une brume, et pourtant je m'y
retrouve dans tes yeux...
Bien qu'ils n'aient pas la même couleur que les miens,
Ils regardent dans la même direction.
Ainsi nos deux reflets se font face en même temps qu'ils se tournent
dans la même direction.
Pourtant nous ne sommes pas deux vierges nées dans l'instant de la
rencontre,
un sculpteur aux mains fallacieuses nous à déjà travaillé auparavant,
Nous mélangeant encore à d'autres terres, nous assemblant et nous
défaisant,
à ses yeux invisibles nous ne sommes que des ébauches.
L'amour n'est rien où toi tu es trop.
L'amour n'est qu'un mensonge,
Toi, tu es mon illusion;
et j'aime à te croire, à croire en toi,
comme un homme en un dieu.
Je te sais si immatériel, à la fois fait de chair et de sang,
Tandis que mon esprit ne peut s'empêcher d'interpréter avec un zèle
déplacé, l'écho de ton reflet.
L'amour n'est qu'une illusion, tu es bien réel, mais je te vois amour;
Je te vois, illusion.
Tu es, tandis que tu n'es pas pour moi...
Alors il me faut parcourir d'autres territoires de toi-même pour te croire
ou te voir.
Je pars comme un nomade dans ton Sahara, assoiffé de te boire,
croyant à tous tes mirages et tes oasis...
Me heurtant à ton désir, aux étoiles de ta tendresse,
aux dunes de ta douceur, aux épaves de ta vie d'avant et de celles à
venir...
D'autres aviateurs t'ont exploré avant moi; d'autres le feront.
Ton sable est chaud sous mes pieds,
Si suave que je m'y brûlerais les pieds sans même m'en rendre compte.
Si doux, que je me réveillerai de ta traversée comme après le plus doux
des rêves,
De ceux qui vous transforment une journée en petit paradis;
Si doux que ma vie n'en sera que meilleure, sans heurt.
Puis l'oubli peu à peu s'installera dans ma vie, effacera ce doux rêve et
le remplacera probablement par un autre.
C'est ainsi, tu le sais, et tu t'effaceras, mon reflet, tu t'oublieras toi aussi
dans les abîmes d'un autre reflet.
C'est ainsi, nous ne sommes pas tristes, nous le savons déjà.
Et nous courrons avec le même intarissable désir vers ces nouvelles
illusions perdues, aussi vierges et heureux que des glaises fraîches.
Nous laisserons nos illusions s'évaporer dans la brume, se rendre au
chaos comme il a toujours été promis.