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L'éternelle heure du thé

Textes, théâtre et poésie de L.H.C. (Tous droits réservés)

DIALOGUE POUR LES SOURDS

Une femme. Un bureau administratif. Des patients.

Les acteurs sont mélangés au public. Le public peut intervenir. Les acteurs doivent laisser faire sauf si le public semble s'enliser dans un processus non-productif.

 

Au public :

— Bureau International de la fin du Monde !

les réclamations sont ICI.

 

— Le manoir percé d'araignées.

Comme si le futur n'était plus l'affaire des hommes.

 

— Exemptons le futur !

 

— …Expire sur le fil.

 

— Il y a tout ce qu'il me faut ICI,

Monoprix et le théâtre à cinq minutes,

la faculté à dix,

et Paris à 2h00 de chez moi.

 

— Je n'aime pas me lever après 10h00.

Midi vient si vite…

 

— Un souvenir me revient et j'aime à m'en souvenir

comme une photo floue à demi-effacée où le laid est oublié :

c'était Nous.

— Crise d'hilarité populaire.

— Cadavre violent quand mon corps désir.

C'est un cerf-volent qui s'enflamme dans le ciel de nos soupirs.

Plus rien qu'une île déserte,

Pas même un olivier pour repousser.

Repousser au loin les dernières pensées.

Plus rien.

Ton corps lambeaux.

C'est un incendie qui a fait feu de nous.

À tous vents…

 

— LA FIN DU MONDE C'EST NOUS.

 

— LA FIN DU MONDE C'EST NOUS.

 

— LA FIN DU MONDE C'EST NOUS.

 

— LA FIN DU MONDE C'EST NOUS.

 

— Je me suis terriblement assagie,

je crois que je suis devenue chiante.

 

— Mes pieds, mon corps, avaient besoin d'être lavés.

J'ai vu des choses comme vous n'en avez jamais vu !

Le divin supplice.

Être condamné à la beauté d'une femme !

Désormais je hantais les rues de Rome vêtu de la peau d'une femme.

Cette peau ne m'allait d'ailleurs pas si mal, car moi homme, j'avais bien en moi le tiers d'une femme.

Voilà que maintenant, j'avais l'aspect des deux autres.

Et quelle femme! J'étais un canon de beauté, et mes yeux éclairés visaient les hommes comme des traînées….

Mes formes m'ouvraient les portes qui auparavant m'étaient closes.

J'étais maintenant un « pédé-rare » à l'hallucinante beauté.

Étant autorisé dans cette enveloppe d'emprunt à croquer tout ce que je désirais.

J'étais une lettre où dominait le masculin, des adverbes jusqu'aux adjectifs, et je me trouvais bien lové dans une enveloppe rédigée au féminin.

Je comprenais enfin ce qu'était ma mère.

Soudain, venant des profondeurs, on entendit une voix s'élever :

— Est-ce bien raisonnable ?

C'était la voix de Cocteau qu'on avait pas oubliée.

Soit, vous l'avez bénite, je l'aurais maudite.

On aurait pourtant dit que je m'y étais lavé…

La source magique ; qui rend plus femme ce qui est ferme, et plus ferme ce qui est fameux…

 

— Eux !

 

— Œufs !

 

— N…

 

— Et bam !

 

— Bim !

 

— Schlac !

 

— Au-delà de cette limite, votre ticket n'est plus valable :

Au-delà de cette limite, plus rien n'est valable.

 

— Ici, c'est la fin du monde.

 

— Oui, ici c'est la fin du monde. Inutile de continuer : il n'y a plus rien après.

 

— Vous savez nager ?

 

— Inutile de mentir, ça se voit tout de suite à votre figure.

 

— Les mensonges, c'est comme les vérités, c'est faux.

 

— Les mensonges sont comme les vérités, tous sont faux.

 

— Plus rien n'a d'importance que l'importance de ne plus en avoir.

 

— Paris. La ville à perte de vue,

Pas un champ dans le lointain.

Rien qui ne nous rappelle que la terre existe.

Rien….

Partout du béton et des plantes en cage.

 

— Il le décrit comme tel (septain !)

l'obscur séjour des mortels.

Ses palabres sempiternelles (octosyllabe !)

Ombrent leurs plates sauterelles.

Et l'on voit désormais, fatigué par l'été (hendécasyllabes ou onzain….)

Le long des routes, des promeneurs usés.

ce qui donne :

On voit désormais, fatigués par l'été (décasyllabe)

Sur les routes, des promeneurs usés.

Désormais, fatigué par l'été, (octosyllabe !) encore une fois….

marchent des promeneurs usés.

 

— Plus rien n'a d'importance que l'importance de ne plus en avoir.

 

— Il est temps de me coucher, me coucher dans mon lit de citronnelle.

 

— Me voilà, abîmé dans les soirs stellaires.

Aussi profondément ouvert qu'un trou noir de mes pensées.

 

Tandis que je pleure les larmes molles de ma bouche ensanglantée.

Une étoile sur ta peau, murmure comme un ruisseau.

 

— Le lendemain le fleuve.

Oui, le lendemain le fleuve.

Parfaitement !

 

— Atterré resteront les hommes.

 

— À terre l'avenir.

 

— A terre les églises.

À terre les prières.

À terre les espoirs.

Plus de ciel où lever les yeux.

 

— Dieux morts dans un accident de deltaplane.

 

— Même les dieux nous ont quittés.

Mais qu'est-ce qu'on va devenir ?

 

— Dieux morts en deltaplane.

 

— D'où je viens n'a pas d'importance.

 

— Cette fois je le sais, la vie va passer très vite.

 

— Dieux morts en deltaplane.

 

— Je rentrerai demain dans ma maison d'argile.

 

— Demain je vis une femme traverser la rue. La rue de tout le monde.

 

— On est déjà maître du passé !

 

— Quel passé? Avez-vous seulement un passé ?

 

— Qui ?

 

— Quoi ?

 

— Un passé ?

 

— Quelqu'un a passé ?

 

— Bienvenue au bureau des réclamations de la fin du monde ! Je vous écoute.

 

— Eh bien c'est à propos…

 

— Bienvenue au bureau des réclamations de la fin du monde ! Je vous écoute.

 

— C'est à propos de mon chien !

 

— Bienvenue au bureau des réclamations de la fin du monde ! Je vous écoute.

 

— Dites, qu'est-ce qu'il y a après la mort ?

 

— Je vous écoute !

 

— dites…

 

— Bienvenue au bureau international des réclamations de la fin du monde.

 

— Merci. Mais j'aimerais savoir…

 

— Bienvenue.

 

— Merci mais…

 

— Voilà, je sais.

 

— Qu'avez-vous à déclarer au bureau international de la fin du monde ?

 

— Que je sais.

 

— Que savez-vous ?

 

— Que je sais. Je sais que je sais… Que je ne sais pas.

 

— Socrate.

 

— Dites-le en grec pour voir ?

 

— oïda ouk oïdena.

 

— Et en indi ?

 

— Je ne sais pas.

 

— Mauvaise réponse.

 

— Ah oui, je sais que je ne sais pas.

 

— Le suspect présente une forme obsessionnelle de langage qui le ferme à toute autre communication. Il est donc décrété sourd à tout autre langage que le sien.

 

— Il est impératif de savoir plusieurs langues quand on naît !

 

— Mais il a fallu que je les apprenne !

 

— Le bureau des réclamations n'en a cure.

 

— Et puis je connais la langue de pute, la langue de bois, la poésie…

 

— Le soleil ne se lève plus depuis que je ne suis plus mère.

J'ai beau réciter l'alphabet, je n'y comprends plus rien.

Mon ombre est partie depuis longtemps me laissant seule au soleil.

J'ai peine. J'ai peine. J'ai peine.

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